Voyager au fil des vallées vosgiennes : mosaïque de paysages, entre forêts, étangs et villages secrets

Le massif vosgien, long de près de 250 km et large d’environ 60 km, s’étend entre la Lorraine et l’Alsace et culmine à 1 424 m au Grand Ballon (source : IGN et Parc naturel régional des Ballons des Vosges).

Dans cette colonne vertébrale, les vallées ont chacune leur signature géologique et naturelle :

• Au nord, les reliefs sont plus tabulaires, les vallées larges, aux pentes douces et forêts de hêtres.
• Au centre, le grès rose affleure, créant des escarpements et des cours d’eau vifs.
• Au sud, les vallées encaissées entourent de véritables « foyers d’eau », hérités des glaciers, avec une mosaïque de prairies, de tourbières et de lacs.

L’étagement altitudinal, la nature du sous-sol (granit, grès, schistes), la présence d’anciennes glaciers et une pluviométrie généreuse (jusqu’à 2 000 mm/an près de Gérardmer, source : Météo France) alimentent une diversité inédite sur un périmètre aussi « compact ».

La vallée de Munster, à cheval sur l’Alsace et le versant lorrain, condense à elle seule la variété du massif. Son fleuve, la Fecht, a creusé un large sillon bordé de chaumes (alpages vosgiens d’altitude) et de forêts mixtes.

• En amont, on grimpe aux lacs du Schiessrothried et du Fischboedle, cernés de conifères, avec des à-pics de granit et des chaos rocheux.
• À mi-hauteur, les pâturages du Gaschney accueillent, en saison, les fameuses marcairies – fermes d’estive proposant repas marcaire, Munster AOP, et produits traditionnels (source : Maison du Fromage à Gunsbach).
• En contrebas, le paysage s’ouvre sur les villages de la vallée, dont Munster, dominé par l’abbatiale bénédictine. On y découvre une mosaïque de prairies, rivières et vignes de montagne, particularité rare dans la région.

La vallée héberge aussi le Parc naturel régional des Ballons des Vosges, qui protège de nombreuses zones humides et forêts classées Natura 2000.

Moins célèbre que la Moselotte ou la Doller, la vallée de la Plaine est un pays de ruisseaux encaissés, réserve d’eau cruciale de la Lorraine par le système d’étangs et retenues (réservoir de Pierre-Percée, lac de la Maix). Ici, la forêt couvre près de 80% du territoire (source : ONF).

• La présence de tourbières, prairies de fauche, hêtraies sapinières et zones humides du Donon en fait un sanctuaire pour le lynx, le cincle plongeur et d’innombrables espèces de libellules.
• Le village de Vexaincourt, noyé dans le vert, compte encore des scieries hydrauliques, témoins d’une activité humaine ancienne mais discrète.
• Le sommet du Donon (1 009 m) était un haut-lieu spirituel celte, marquant la jonction entre Lorraine et Alsace.

Sa particularité : le passage, parfois soudain, d’épaisses forêts de résineux à d’étonnants plateaux ouverts sur la Sarre blanche, puis à des écosystèmes de tourbières quasi nordiques.

Le versant alsacien du massif propose lui aussi une superposition de paysages.

• La vallée de la Thur s’étire du Haut-Rhin jusqu’au Thillot et au col de Bussang. Elle offre un contraste remarquable : industries textiles de Vieux-Thann, forêts de sapins, enfilades de lacs glaciaires (lac de Kruth-Wildenstein), et chaumes panoramiques. Les crêtes sont parmi les plus ventées du massif, offrant par temps clair une vue jusqu’aux Alpes.
• La Doller, plus encaissée, multiplie les barrages (barrage de Sewen), les anciens moulins et une alternance de prairies de fauche et de forêts. Les villages y révèlent une identité mi-vosgienne, mi-rhénane.
• La Lauch, quant à elle, relie la Route des Crêtes aux vignes de Guebwiller, avec des pentes abruptes et un système d’irrigation traditionnel – les Wasserlauf.

À noter, ces vallées sont riches en sentiers thématiques (Sentier de découverte de la Weiss, circuit des Hautes Huttes), attestant d’un patrimoine rural vivant (source : Parc des Ballons des Vosges).

Située entre La Bresse, Cornimont et Saulxures-sur-Moselotte, la vallée de la Moselotte s’avère l’une des plus variées du versant lorrain.

• Elle mêle cascades, gorges, lacs (Lac de Blanchemer, Lac de la Moselotte – plus de 9 ha), scieries anciennes et filatures textiles aujourd’hui transformées.
• Sur ses hauteurs, on passe des forêts sombres à des chaumes lumineuses, puis à des landes à myrtilles et bruyères, refuges d’une biodiversité exceptionnelle (lynx boréal, chamois, faucon pèlerin, recensement LPO Vosges).
• De nombreux villages (Ventron, Saulxures) sont connus pour leur patrimoine rural : fermes « en rectangle », lavoirs, petits musées, marchés de produits locaux.

Une originalité : la cohabitation de tronçons encaissés et de larges vallées transversales, avec parfois des microclimats (aperçus autour de Cornimont : jusqu’à 3 semaines de décalage de floraison par rapport à la Bresse).

Quelques vallées vosgiennes émergent par un trait thématique fort, qui agit comme signature :

• La vallée de la Vologne, dominée par la célèbre cascade de Tendon (plus de 30 m de hauteur – la plus haute des Vosges, source : Comité Départemental du Tourisme des Vosges), déroule ses sinuosités entre forêts profondes, chaos granitiques et hameaux serrés.
• La vallée du Rabodeau, classée « Pays d’art et d’histoire », propose un cheminement émouvant entre abbayes cisterciennes (Senones), villages ouvriers du XVIIIe et mémoriaux de la Résistance.
• La vallée de Sainte-Marie-aux-Mines, haut-lieu du textile puis de la filature d’argent, alterne mines, forêts, pâturages perchés et crêtes dégagées qui forment la ligne de partage des eaux entre Rhin et Moselle.

Certains villages (Le Val-d’Ajol, Ramonchamp) mêlent même influences vosgienne et franc-comtoise, illustrant le caractère « carrefour » du massif.

• Varier les saisons : beaucoup de randonneurs ne connaissent les Vosges qu’au printemps ou en été, mais l’automne parfume les vallées de senteurs de champignons, et l’hiver enveloppe les pistes forestières de silence ouatés. Les torbières du Donon deviennent magiques en novembre. Le lac de Gerardmer gelé attire grues et canards nordiques.
• Mélanger activités et approches : marche, vélo (la Vallée de Munster possède des pistes cyclables jusqu’aux crêtes), ski nordique (La Bresse, Le Rouge-Gazon), observation de la faune (marais de Lispach). Privilégier les sentiers balisés par le Club Vosgien, souvent entretenus bénévolement depuis 1872.
• Prendre le temps des détours : certains des plus beaux points de vue sont accessibles par d’anciennes voies de chars, comme le chemin des Espagnols au Markstein ou la route forestière du lac Vert.
• Respecter la vie locale : éviter les sites sur-fréquentés en haute saison (Roche du Diable, Gastlosen, route des Crêtes), préférer la visite des marchés de villages (Bussang, Cornimont), discuter avec les habitants, goûter à la brimbelle ou à la tarte au fromage blanc.
• Quelques repères pour choisir son itinéraire :
  • Pour les amateurs de paysages ouverts et lacs : Moselotte, Vologne.
  • Pour le patrimoine et les anecdotes historiques : Munster, Rabodeau, Sainte-Marie-aux-Mines.
  • Pour la faune, la flore rare et les forêts anciennes : vallée de la Plaine, Thur, Donon.

Explorer les vallées vosgiennes ne se résume pas à chercher le panorama le plus spectaculaire, mais bien à s’imprégner de la vie qui s’y attend, discrète. Entre bouleaux blancs, villages de schiste aux volets fermés, anciens ponts de pierre ou prés humides bruissant de cigales, l’émerveillement se niche aussi dans les intermèdes : dans l’œil d’un jeune cerf à l’aube, dans une église romane redécouverte après la brume, ou sur le pas d’une vieille grange couverte d’ardoises rouges. Les Vosges sont un pays de paysages variés, à l’image de ceux et celles qui les font vivre.

Sources : IGN, Météo France, Parc naturel régional des Ballons des Vosges, LPO Vosges, Comité Départemental du Tourisme des Vosges, ONF, Maison du Fromage de Munster, Club Vosgien.